les paroles de l’album oubliez les heureux

1.  j’voudrais pas crever – Jeanne elle travaille le soir dans un bar. Elle passe ses nuits à servir des whiskys. Quand elle revient au petit matin Jeanne elle s’endort aux parfums des remords. Elle a pas l’temps pour aucun d’ses amants. Elle se fane dans les draps en gémissants leurs noms. Y a rien sous ses cils rien dans l’appartement. Les cris de la ville pour seuls compagnons. Au pied du lit un vieux bouquin écorné. Et à l’encre rouge j’voudrais pas crever. Elle commence à en avoir marre de n’être jamais de nulle part. Elle commence à en avoir plein l’dos des cinglées et des fachos. Elle commence à en avoir marre – elle est au bout du rouleau! Jeanne elle travaille le soir dans un bar. Elle passe ses nuits à servir des whiskys. La gueule défaite de larmes et de rimmel. Elle chante un vieil air de J.-P. Capdevielle. Marc au turbin lui il conduit des trains. Il passe ses nuits à traverser le pays. Quand sous ses roues Jeanne s’est jetée Marc s’est dit moi j’voudrais pas crever. Quand les nuits Jeanne viendra vous crier ces quatre mots de sa voix de damnée ça c’est sûr ça va la faire marrer d’lire dans vos yeux j’voudrais pas crever.

 2. au loin la ville – On n’avait pas peur ni des diables ni des dieux. On restait debout dans le froid près du feu. Quand ça mordait trop on relevait nos cols. On f’sait passer le clope et le flacon d’alcool. Au-dessus de nous les ponts et le ciel mort avaient embrasé la ville où s’endormaient 600’000 imbéciles. On r’descendait au port là où il y avait du vent qui collait sur nos corps la rouille des cargos jaunes et blancs. Au loin la ville résonne. Et elle pardonne aux hommes qui reviendront plus hanter ses rues. On f’sait les 400 coups. On piquait des bagnoles pour aller tailler les routes tordues des cols. Mais la nuit et la ville nous rappelaient à elles. Nous on croyait en rien mais on leur était fidèle. Toi t’étais amoureux d’une des filles des patrons qui voyait pas d’un bon œil que tu viennes de sortir de prison. Moi j’avais leurs noms tatoués sur les bras. Y en avait plus de 100. La dernière s’appelait Emma. Au loin la ville résonne. Et elle pardonne aux hommes qui reviendront plus hanter ses rues. Au loin la ville résonne. Et les hommes lui pardonne d’avoir fait ce qu’elle a pu. Les aimant à leur insu.

3. elles viennent avec moi – Les agaçantes les énervantes les p’tites piseuses et les grosses chieuses les putains les piteuses les torturées les mal-aimées les pleurnicheuses les vraies saletés les boiteuses les voûtées les sales gamines les mesquines les p’tites connes les bonnes à rien les salopes les catins les dépitées les pas-baisées les pinailleuses les périmées les véreuses les cinglées les j’me-fous-d’toi les j’en-manque-pas-d’air elles iront pas en enfer elles viennent avec moi. Les fatigantes les épuisantes néfastes funestes affligeantes les malfaisantes les fofollantes les grandes démentes les mégas chiantes les aguicheuses les désastreuses les nanana-neuses les vampireuses schizophrèneuses  superultrakalilichieuses les tire-toi-d’là les j’en-manque-pas-d’air elles iront pas en enfer elles viennent avec moi. Et elles pleurent pas seules dans le soir. Et elles pleurent pas seules dans le froid. Elles pleurent dans mes bras.

4. quand j’en aurais fini avec toi – J’aime pas trop cet air narquois que tu prends quand tu m’regardes. Tout doux dis donc exagère pas. Tout doux, prends garde. La haine est un oiseau rebelle elle n’a jamais connu de loi mais si tu me hais pas je te hais et si tu me hais c’est déjà ça. C’est toujours la même histoire on s’emmerde on traîne les bars on attend que r’vienne la nuit on a même pas d’quoi aller voir les filles. Quand j’en aurai fini avec toi i restera rien. Plus personne se fringue comme ça plus personne se coiffe comme ça c’est pas possible tu l’fais exprès ou quoi plus personne n’a cet air-là. La haine est enfant de bohème elle n’a jamais connu de loi je t’évite quand tu t’invites et quand tu m’évites c’est déjà ça. C’est toujours la même rengaine sous les ponts nous on s’promène on s’emmerde sous le lampadaire on a même plus d’quoi s’payer des bières. Quand j’en aurai fini avec toi i restera rien.

5. zero no good #XXXXXXX – I hardly ever noticed though I’ve been awake that the eyes of my lovers were full of hurt and full of hate. So I took the late train and went home as I could. Watched through the open window what I’ve never understood. The evening’s gone but the night is young and I might just hang around to see if there is something I can find. C’mon love. I have been a-aching. I’ve been mad enough. I’m looking for a-soothing. I tried to remember what it was that you said but every word is long gone now and has cleared its way out of my head. There’s nothing in my pocket and my coat is full of holes of everything I lack and need and you’re the one I miss the most. I’ve been here all day and there is nowhere else to go. I am done doing what I’m told. C’mon love. I have been a-aching. I’ve been mad enough. I’m looking for a-soothing. My shoes are soaked and my pants are soaked and I’m all drenched myself. There’s an old man trying to cross the road he’s walking weakly with a cane. There’s so much rain in front of me that I can’t even see my own eyes. The world is dressed in white and grey and full of bad guys in disguise. I’ve never been that
good at anything in my life. I’ve never been that good at goodbyes. It’s been kind of hard to swallow all these years but I’d wish you’d have the nerves to come and tell it to my face. In a little space somewhere between what you want and what you fear I’d wish you’d have the nerves to come and tell it to my face. I hardly ever noticed that I never knew what to do. It seems amazing to me now that I ever was in love with you. So I took the late train and went home as I could. Watched through the open window what I’ve never understood. The night is gone but the morning’ young and I might just hang around to see if there is someone I can find.

6. jade quitte la ville – Jade quitte la ville l’asphalte est en feu. Jade montre les dents aux libidineux. Lève ses yeux aveugles. Dénoue ses cheveux. Tend ses poings et crache aux cieux. Jade provoque la colère de dieux. Ah! La belle étoile! Jade quitte la ville sans faire ses adieux. Elle a l’air d’un drapeau en feu d’une guerre nucléaire d’un bateau qui brûle en pleine mer d’une gosse des banlieues. Sous un ciel orange Jade s’éloigne. Dans son dos les flammes gagnent et dangereusement rejoignent ses deux yeux morts pourtant fiévreux. Ah! La belle étoile! En route! En route! Sous les deux cornes de la constellation d’Aldébaran Jade en flammes dans la nuit rouge prend son élan.

 7. ta g »%#le – Ohlala kes k’c’kça?! Ohlala ça ça va pas! c’est un peu de guerre lasse ouais c’est un peu de guerre lasse mais j’t’le dis t’as l’haleine d’la chatte fermentée d’une femme un peu grasse c’est un peu de guerre lasse que j’t’le dis! Mais dis donc, c’est l’bordel ici, non? Faudra penser à m’ranger tout ça fissa fissa oui! Sinon j’te foutrai une paire de baffe dans la gueule. J’te foutrai une bonne paire de baffe dans la gueule dans la gueule.  Dans lalala dans la gueule. c’est un peu de guerre lasse ouais c’est un peu de guerre lasse ma cerise i faudrait quand même un jour que tu t’regardes dans une glace fais gaffe tu vas avoir une sale surprise! mais merde alors j’croyais qu’ça arrivait qu’aux blondes t’as pas compris qu’tu fais vraiment chier l’monde et qu’tu vas t’prendre une paire de baffe dans la gueule ouais tu vas t’prendre une paire de baffe dans la gueule dans la gueule dans lalala dans la gueule! c’est un peu de guerre lasse c’est un peu de guerre lasse ma p’tite pute c’est un peu de guerre lasse c’est un peu de guerre lasse mais tu putes…

 8. astrosong – Astronaute salut viens voir un peu par ici. est-ce que tu préfères les garçons est-ce que tu préfères les filles. Astronaute salut viens voir un peu par ici. c’est un peu confus un peu confus aujourd’hui. salut viens voir un peu par ici salut tu préfères tu préfères les filles tu préfères tu préfères les filles. C’est un peu confus confus aujourd’hui. on s’balade un peu – y a tout qui prend feu. on en croit pas nos yeux – y a tout qui prend feu. c’est pas étonnant si tout va si mal à présent. Hé salut – y a tout qui prend feu. viens voir un peu par ici. salut – y a tout qui prend feu. tu préfères tu préfères les filles tu préfères tu préfères les filles. C’est un peu confus confus aujourd’hui. un baiser de David Bowie. un baiser de Klaus Kinsky Klaus Kinsky Klaus Kinsky -c’est pas étonnant si tout est si sale à présent c’est pas étonnant si tout va si mal si mal à présent

9. on m’aime – Les gamines et les gamins i m’aiment bien. Les ptis chats et les ptis chiens i  m’aiment bien. Les bistroquets du coin i m’aiment bien. Tous mes vieux copains i m’aiment bien. Y a quelques chauds lapins qui m’aiment bien. Plusieurs poulets d’la Place Machin qui m’aiment bien. Y a quelques trous du cul qui m’aiment bien. 2, 3 inconnues qui m’aiment bien. On m’aime chez les trucs, chez les portugais. J’ai mes entrées dans les clubs gays. On m’aime jusqu’dans les cimetières les morts m’invitent à venir prendre un verre. On m’aime de Barcelone à Jérusalem. On m’aime même dans les clubs SM. Du Mexique à la Mecque on m’aime idem. C’est fou ce qu’on m’aime, c’est un vrai harem. Mais elle, elle en a rien à secouer de moi. Elle a pas peur de mourir. Elle s’essuie la bouche et se met à rire. Elle crie que l’bonheur c’est des conneries. J’ai voulu m’faire fleuriste pour lui dire la vie en roses. J’ai voulu m’faire droguiste pour lui filer sa dose. J’ai voulu m’faire horloger
pour cueillir ses heures. J’ai voulu m’faire boulanger pour sucrer son beurre. J’ai voulu m’faire photographe pour lui tirer l’portrait. J’ai voulu m’faire pornéaste pour lui faire faire des trucs. J’ai voulu m’faire chorégraphe pour la faire valser. J’ai voulu m’faire autographe pour la faire signer. J’ai promené son teckel. J’ai lavé son linge. J’ai fait du lèche-vitrine. J’ai fait le singe. J’ai payé ses PVs. J’ai léché ses timbres. Astiqué ses w.-c. et graissé son flingue. J’ai fait mettre au trou un type un peu fou d’elle. J’ai fait mettre des verrous. J’ai placé des sentinelles. Un soir d’été où elle était pas rentré j’ai ameuté tout l’quartier j’ai fouillé ses poubelles. J’ai fait ce qu’on fait quand on veut impressionner. J’ai appris la boxe thaï. J’suis ceinture noire de karaté. J’ai appris le mandarin et perfectionné mon bédouin. J’ai aussi appris la natation synchronisée. J’ai appris la haute-couture sans trop faire la forte tête. J’ai appris à composer des p’tites opérettes. J’ai appris l’accordéon. J’ai appris la trompette. Même que quand j’en joue (nom de dieu) ça en jette. Elle a pas peur de mourir. Elle s’essuie la bouche et se met à rire. Elle crie que l’bonheur c’est des conneries. Go-go-go! Yea-yea-yea!

10. the sad story of the fisherman’s daughter – She was a fisherman’s daughter. I fell in love with her one winter. We took the boat out and drifted off the shore. The sharks were swimming in the water. Spring came and went in a fever. She was so young we were so eager. I walked her down the aisle. It started snowing on the shore. I put a ring on her finger. I bought her roses that summer. We even knitted a net together. We would take long walks on the paths along the shore. And each time went a little further. She had to stay in bed all autumn. Did as the doctors said. And then I lost her. To her gravestone I bring flowers. Holding the hands of our daughters. We take the boat out and we drift off the shore. It feels so lonely on the water. It feels so lonely on the ocean.

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Gone Dark, le clip

GONE DARK (extrait de la B.O. du film RETOURNE-TOI de Marc Décosterd)

We had many rhums… It’s easy to forget… We had had our share of regrets… Come and have with me one last drink tonite… Since this is goodbye… And then I’ll leave…

The road’s gone dark before our eyes… The road’s gone by before our eyes…

I still see the sky on the day we met… Helter-skelter high… Look how low we now get…

The road’s gone dark before our eyes… The road’s gone by before our eyes…

I know it’s a long ride…

(paroles, musique, arrangements: J.Giller)

Filed under: Lyrics,Vidéos  |  Publié le 16/10/10  |  Un commentaire sur Gone Dark, le clip  |  Ajouter à Facebook

Neuf cent neuf femmes de face (les lyrics de l’album)

(Paroles, musiques, arrangements : J. Giller)                                  

1  What’s the point. Elle aime s’faire belle.      She’s a painkiller. Cartoon lover. Looking under her pillow at nite. When I met her, she’d put her make-up. Oh her head was shining so bright. She’s a cheese eater. Money maker. When the week is over she loves getting high. When I met her, she’d put a t-shirt that was such a teaser. It brought out her eyes. What’s the point now, what’s the point? Looking, fucking looking. On all nite. Lollipopper. Lobster lover. She drank Dr Pepper but she prefers Sprite. When I met her, in her low cut trousers in Technicolor, careful she bites. Elle aime s’faire belle, elle aime s’faire. Elle met trois pulls à l’endroit. Elle n’en met pas plus de trois. Et le dernier à l’envers pour les coutures les revers. Le ventre long comme la mer. Elle aime ça quand on l’aperçoit. Les mecs regardent le grand jour dans ses beaux yeux de poupée en velours. Elle aime ça quand les gars l’aperçoivent. Elle a la tête qui cogne et ses amours fanfaronnent. Quand tu vois sa petite gueule d’amour tu pourrais y foutre le feu parce qu’elle a de la merde plein les yeux. Et elle confond tour à tour le nom de ses amoureux qu’elle a traînés dans son pieu. When he met her, she’d put her make-up. Oh her head was shining so bright.

2  Elle en a marre. Don’t.     Elle en a marre. Elle se couche tard. Elle broie du noir. Elle prend du poids. Elle perd du poids. Elle fume le cigare. Elle s’épile pas. Elle en a marre. Assez rigolé, elle a passé une sale journée. Assez rigolé, elle est si, si lessivée. Assez rigolé, elle a passé une sale journée. Oh pourquoi tu pars, oh pourquoi tu pars. Elle en a marre. Elle cogne dans l’tas. Elle traîne les bars. Elle a l’cafard  Assez rigolé, elle a passé une sale journée. Assez rigolé, elle est si, si lessivée. Assez rigolé, elle a passé une sale journée. Oh pourquoi tu pars, oh pourquoi tu pars. Don’t do this, don’t do that – Be a good girl, don’t be bad – Don’t do this, don’t do that – Don’t lose your head, don’t go mad. Elle en a marre. Elle en a marre. Elle en a sa claque. Elle en a marre. Faut pas déconner, elle a passé une sale journée. Faut pas déconner, elle est si, si lessivée. Faut pas déconner, elle a passé une sale journée. Oh pourquoi tu pars, oh pourquoi tu pars. Don’t do this, don’t do that – Be a good girl, don’t be bad – Don’t do this, don’t do that – Don’t lose your head, don’t go mad – Don’t do this, don’t do that – Be a good girl, don’t be bad – Don’t do this, don’t do that – Don’t do deeds that will make you sad – Don’t do this, don’t do that – Be a good girl, don’t be bad – Don’t do this, don’t do that – Be glad to have what you’ve had.

3  Come back to me. Un jour elle pourra partir.     She’s been a-travelling the seven seas on her boat. She owns her own plane and her own horse. She’s got used to be fed on little white lies. Yet when dusk comes she still cries: “come back to me, my love”. Come back to me. She’s been a-reading Hemmingway a lot. She knows a few pages by heart. She’s said to be a beauty, to be witty and bright. Yet when dusk comes, she’s still cried: “come back to me, my love”. Come back to me. Un jour, elle pourra partir. My love. Un jour, elle pourra partir. Come back to me. She married a nice guy, good-looking and sweet. She’s been standing strong on her feet. She’s been a-lulling her new born child to sleep. Yet late at nite she still weeps. Et encore tu vois, elle a pas tout vu. De pastilles en pilules, elle a pas tout prévu. C’est quoi cet épais brouillard, c’est quoi cet épais brouillard. Qui la bouffe chaque soir, lui prend la tête, lui fait sa fête, la reprend, la jette, la retourne comme une crêpe. On a jamais su, on a jamais su. Dieu sait ce qu’elle est devenue, on l’a jamais revue.

4  On The Way, Mademoiselle.     She got home and phoned me. She got lonely, broken-hearted. She’s got many worries. She got fucked and talks about it. She’s got such sad stories. She’s gonna get it how she wanted. She gone to the movies. She said she loved it cause it’s lovely. She got home and phoned me. She got lonely, broken-hearted. On the way. On the way. She’s lots of noise when she screams. She feels better when she’s done it. Mademoiselle a d’l’ennui. Elle lit au lit des magazines. She’s throwing a party, mademoiselle is turning forty. Mademoiselle s’épanouit, milite pour les femmes, les famines. She gone to the movies. On the way mademoiselle. Elle dit qu’il est bête, qu’il est bête comme ses pieds. Si tu dis qu’elle est pas chouette, alors elle te répond que pourtant c’est un fait, car mon dieu qu’il est con. Elle n’en fait qu’à sa tête, défend les sans-papiers. Car elle a ses idées, c’est une femme engagée. Elle est contre la guerre, pour la liberté d’expression. Il faut pas la charrier, oui, elle a ses opinions. Elle est fille d’immigrés, elle connaît la question.

5  Va te faire voir, Marilyn. Of all her worries.     Elle s’accroche aux petites choses, elle lit des bios de Marilyn Monroe. Mais elle l’aime pas trop, elle préfère Brigitte Bardot. Au matin elle a tout mélangé, elle sait plus si ce qu’elle a lu lui est vraiment arrivé. Ouais, c’est un peu embrouillé dans sa petite tête usée. Elle arrive pas à dormir. Elle relève jamais son courrier, elle dit que ça lui fait juste trop chier. Le soir, elle Prévert et s’resserre un verre. Elle ramène un mec pour la nuit, elle s’démaquille, il s’est endormi. Ouais quelle drôle d’idée, elle voulait prendre son pied. Elle arrive pas à dormir. Elle voudrait savoir si elle aime ça ou elle aime ci. Elle voudrait comme copine les filles dans les magasines. Elle voudrait voir comment ouais ouais ouais être dans le vent. Elle voudrait être Jeanne Moreau, rencontrer les Rolling Stones. Elle voudrait tout dehors, tout dehors et rien dedans. Elle voudrait un beau gosse avec qui elle pourrait lalalala. Elle voudrait qu’ça vienne, ouais, ouais, ouais elle attend qu’ça. Elle voudrait en redemander, elle adore faire son cinéma. Elle voudrait s’écrier « Vive la violence ! » Elle voudrait faire la folle, voir une fiesta espagnole. Elle voudrait tout refaire, ouais tout envoyer en l’air. She tries to sleep, she reads bedtime stories. She clears her head of all her worries. 

6  Garçon manqué. Let’s go.     Elle a pour habitude d’aller au café au coin de la rue et d’y rester un très très long moment. Elle est un peu tête en l’air, elle regarde jamais en arrière, elle aime bien prendre son temps. Elle fait garçon manqué avec ses cheveux coupés courts, ses jeans usés et sa vieille paire de baskets démodées. Dans ses poches, il y a pas un sou, elle peine à joindre les deux bouts pour payer ses livres à l’université. Y a plein d’garçons qui l’aiment bien, qui lui font leur baratin. Ouais qui s’donnent un mal de chien, mais pour eux c’est tintin, elle n’en f’ra rien. Y a plein d’vieux beaux qui l’aiment bien, qui l’emmèneraient manger indien. Qui lui font du grain chaque matin, mais z’ont beau faire leur malin. Elle n’en f’ra rien. Dans son appart mal rangé, il y a des piles de bouquins, de CDs, de photos d’elle en vacances en été. Aux murs il y a Jean-Pierre Léo, Luchini et Jeanne Moreau, Romi et Piccoli sur un vélo. Y a Dutronc et Belmondo, Brel et Brassens sur la même photo, Charles mort ou vif au-dessus d’un Picasso. Y a un coin à côté de l’évier, où elle s’assied pour fumer en posant ses pieds sur la machine à laver. Y a des jours, elle voudrait bien avoir un joli jardin avec des poules, des lapins. Un vieil âne qui mangerait du foin, mais elle n’en f’ra rien. Y a des jours, elle voudrait bien sauter dans n’importe quel train. Se barrer pour aller très loin, Madrid, Moscou ou Berlin, mais elle n’en f’ra rien. She has many foreign friends who live in many foreign lands. She spends nights with them on the phone, the phone. One of them owns an old Renault, she’s a big fan of François Truffaut. When one of his movies is on she screams let’s go, let’s go. One of them owns a Lamborghini, she’s a big fan of Fellini. When one of his movies is on she screams let’s go, go, go. One of them is Jean-Luc Godard and he’s got no fucking car. When one of his movies is on he screams let’s go, let’s go. One of them is Jessie James, she’s got kids and a loving man. And she’s a-willing to break the law, the law, the law. Peut-être qu’un jour ça n’ira pas bien, qu’elle chopera un sale machin. Un cancer de la peau ou du sein. Elle sait que pour tout l’monde c’est l’même refrain. Ça lui fout l’chagrin.

 7  She’s been waiting. Du sang à ses colliers.     She’s been waiting, I’ve been told but she’s not been growing old. She’s a hundred but looks twenty. At ten to five she has tea. At ten to nine she has beer. At ten to ten she’s whisky. She’s been waiting, that’s all. She’s been waiting, I’ve been told, she’s been living on her own. She’s been called wicked by kids. She’s been called names because she’s hid. She locked her heart in a box and threw the key to the dogs. She’s been waiting, that’s all. She’s been waiting, I’ve been told. Under her mattress lays her gold. She’s been lurking in the woods. She’s not liked in the neighbourhood. She’s been lurking in the dark. She cries the same way dogs bark. She’s been waiting, that’s all. She’s been waiting, I’ve been told. While she waited she took hold of a baseball bat and then. She smacked them kids in the head. The flesh ripped from the skulls she cooked. She sucked them bones while no one looked. She’s been waiting, that’s all. Elle lave ses mains et l’eau se teinte du rouge sang des innocents. Elle lave les dents qu’elles soient bien blanches. Prend ses vêtements qu’elle jette au feu. La voilà nue, resplendissante. Ses longs cheveux couleur de flamme. Semblent lui fendre la peau comme des lames. De chair et d’os, la voilà femme. Nonchalamment, elle traverse la pièce. Ouvre la cage de son serpent. Lui embrasse les yeux et puis le prend. Le voilà qui danse entre ses hanches. Le voilà qui lèche la belle peau blanche. Qui frémit et tremble sous sa longue langue. Son rire s’envole sous les étoiles Que la nuit affole soûlée de Mal. C’est une danse de tous les diables. Un fruit délectable, une pluie de sueur dans un flot de vapeur. Sous son souffle languissant. En un instant le serpent ivre se fend, s’allonge et se change en cent amants. Souveraine elle a l’embarras du choix. Et il y a du sang à ses colliers, il y a du sang à ses colliers. Qui comme autant de larmes coulent à ses pieds.

8  The boxer #2. La boxeuse.     She’s been travelling the world and moving on. She’s been hanging in there, girl, for too long. She’s been boxing hard their heads until they fell apart. She’s been everywhere, headstrong and tall. Been everywhere and she won them all. Elle a pour seul repaire l’horloge du vestiaire où les heures défilent. Et la peur au bide qui la submerge un instant comme lorsqu’elle avait 15 ans. Elle croit revoir son père et les regards austers et les paroles hostiles du vieil imbécile. « Ma fille abattra un à un les géants comme une héroïne de roman. » Elle n’a pas qu’ça à faire, faut tâcher d’y voir clair, tenter d’faire le vide, de rester lucide. Tandis qu’on l’enduit d’onguents, qu’on lui resserre les liens des gants. Puis : dans les couloirs verts derrière son adversaire. Puis : foule en furie, portraits à son effigie, les odeurs, la chaleur, les gens. La tête lui tourne mais elle se reprend. Elle monte sur le ring. Elle monte sur le ring, elle a les yeux qui brillent. She’s been boxing hard their heads until they fell apart.

9  Gros cul.       Elle revient de loin. Elle a pas bien vécu. Elle revient de loin. Elle a un peu trop bu. Elle revient de loin. Elle a pas bien vécu. Elle revient de loin. Elle dit qu’elle en peut plus. She don’t know anything. She don’t know. She don’t know anything. She don’t. Elle revient de loin. Elle a pas bien vécu. Elle revient de loin. Elle sait plus ce qu’elle a vu. Elle revient de loin. Elle a pas bien vécu. Elle revient de loin. Elle dit qu’elle a un gros cul.

Filed under: Lyrics  |  Publié le 08/07/10  |  Aucun commentaire  |  Ajouter à Facebook

Les Abandonnés (les lyrics de l’album)

 (Paroles, musiques et arrangements: J.Giller)

1  la tête aux murs     On pourrait continuer à rêver d’autres aventures. Continuer à vivre les yeux fermés. A ignorer les blessures. Mais pourtant à la nuit tombée à la lueur des phares l’envie soudaine de s’en aller. S’en remettre au hasard. Pour partir à l’inconnu et traverser les routes noires. Boire à s’en soûler. Boire à s’en brûler l’âme. Faire payer sa dette à la nuit. Ce qu’elle nous a promis. Aller voler des voitures et puis ne plus jamais s’endormir. Oh assez de sentiments bons. Renverser les avions. Donnez-moi du diable et les cornes des démons. Pulls marines en laine le froid dans nos vestes et le vent. La pluie qui s’abat sur toi. L’horizon droit devant. Un jeans usé pour porte-bonheur. Faire briller l’arrogance. La paix dans l’âme et le cœur qui bat la cadence. La tête la première refuser que tout s’achète. Mettre nos peaux aux enchères et nos cœurs au net. Abonnés aux abandons aller brûler nos dernières chances. Malgré le froid la sueur au front fait briller notre arrogance. Fou à lier. Balancer les armures. Se cogner la tête aux murs. Donnez-moi du diable et les cornes des démons. Bientôt on n’en pourra plus. Reste encore d’autres routes. Toujours garder un peu plus les mêmes ombres les mêmes doutes. Qui mettent le cœur en larmes et le brisent au passage. Qui donnent envie des flammes et donnent envie de n’être pas sage.

2  sur les traces de capdevielle     On avait bien regardé le jour qui s’en allait. On voulait s’approcher un peu plus des falaises. Il y avait qu’ça pour nous. On avait bien maudit les voiles qui partaient, on leur jetait des sorts, toujours plus seuls depuis l’quai, il y avait qu’ça en nous. Alors quand elles sont venues nous bouffer de tendresse, qu’elles demandaient qu’on les emmène loin de l’Hôtel de la Détresse, on avait le regard un peu vide parfois. On pleurait même un peu quand ça s’voyait pas. Mais nous, on y a cru, on a cru voir le ciel et les anges de la rue, descendues sur notre terre pour nous prendre dans leurs bras. Elles avaient dans les yeux des couleurs et les jambes aussi belles que des voiles qui se tendent au soleil. Encore, on en demandait encore, ça nous rendait fou. On allait faire l’amour sur les vieilles tombes en pierre et parfois au matin en s’réveillant dans l’ cimetière parmi les morts on se sentait un peu chez nous. Nos baraques s’effritaient et tombaient en lambeaux comme nos bonnes volontés et la peau sur nos os. Nos habits dans le vent flottaient comme nous : perdus. Et dans la poussière des rues, on allait pieds nus. Dans nos mains, les pierres chaudes qu’on jetait au ciel, nous écorchaient les paumes, mais n’abîmaient qu’elles. Mais on n’a pas gardé rancune. On restait bien droit, le regard en l’air. Face à la lune qui éclaire nos infortunes, nos misères. A notre approche les gens s’enfuyaient devant nous. Ils croisaient dans nos yeux vifs une meute de loups. De ceux, tu sais, qui ont la fringale. Alors on a volé quelques sacs de toile qu’on s’est balancé sur l’épaule en bandoulière. On était fier : on aurait dit des voiles. Mais avant de partir, on a été mettre le feu à l’Hôtel de la Détresse pour lui faire nos adieux. Tandis que les braises et les cendres montaient dans les cieux, nous c’était les larmes qui nous brûlaient les yeux. On s’était bien fait avoir, il n’y a rien dans le ciel et les anges de la rue ont vite compris qu’ici c’est pareil et qu’il n’y a rien dans nos bras.

3 un autre jour (pourtant ça s’termine pareil)      Pourtant on s’était pas trop trompé tous les deux. On avait bien regardé dans les yeux – Des autres. On y avait vu tout ce qu’on voulait pas. Nous on voulait un tout petit peu mieux que ça. Alors on avait pris l’habitude d’être heureux. Toujours un peu plus étonné qu’eux – Les autres. Mais on bossait comme des fous, on s’voyait plus que le soir. On parlait de partir, j’voulais aller voir les ours parce qu’ils se font de plus en plus rares. Cols relevés on jetait au feu et à la nuit nos baisers toujours un peu plus tard. Et puis un jour ça nous suffisait plus. Et puis un jour on a en eu vraiment raz-le-cul – Des autres. On a décidé que notre vie c’était pas ça. Qu’on se plierait pas, qu’on se ferait hors-la-loi. Alors on s’est procuré des armes à feu. Et puis on a bien étudié les lieux – Là où les autres s’en vont sagement déposer leur argent. Et à la tombée du soir on s’est braqué la banque. Mais à peine sorti, y avait des flics partout. On s’est jeté dans la bagnole et enfui dans le soir. Elle m’a dit : « t’es fou, on aurait mieux fait de se tordre le cou. » Je lui ai dit : « mon amour j’pouvais pas prévoir ». Reste encore un autre jour sur terre. On bousillait les trottoirs à fond en marche arrière. Dans le rétroviseur on voyait la route qui restait à faire. Et quand la balle m’a percé les artères. La vie s’en allait et je la laissais faire. Et tandis que ses bras me berçaient, moi j’entendais au loin sa voix qui me murmurait : « Reste encore un autre jour sur terre. Reste, viens, je t’emmènerai voir les ours bruns, les ours bleus et les polaires. Je t’emmènerai bouffer de la pluie, retrouver l’or enfoui dans l’eau froide des rivières. Je t’emmènerai te faire les cicatrices et les balafres des corsaires, mais m’laisse pas ici », tandis qu’étendu j’voyais ses larmes qui s’mêlaient à la poussière. « Reste ici. Je t’emmènerai où tout s’éclaire. Où tout s’éteint. Où tout est permis. Où tout reste à faire.»

4  à perte de vue       Elle ne voit rien de ce qui vient. Elle est à fleur de peau. Et dans ses yeux ça brille un peu. Puis ça coule à flot. Aller voir ailleurs si ça fait peur. Mais aujourd’hui, moins peur qu’ici. Elle court toujours pour trois fois rien. C’est comme ça qu’elle est bien. Elle a les yeux qui brûlent un peu puis qui prennent feu. Aller voir ailleurs si ça fait peur. Mais aujourd’hui, moins peur qu’ici. Elle dit : « Non, non. Non, non, c’est pas pour moi. Tout ça, tout ça : c’est pas pour moi.» Elle dit aimer les ours, les louves. Se noyer de lune et d’eau. Elle a les yeux embués de bleu et encore chauds. Ses yeux sont doux dans le ciel d’août. La route tremble – belle et immense – qui lui ressemble sans l’ombre d’un doute.

5  cognac      Allez viens nager dans l’eau claire. Se laisser emporter par la mer. Allez viens nager. Que je te reconnaisse. Nos têtes immergées, nettoyées. Je t’ai et je t’aime ainsi jetée à la mer. Le sable sous nos pieds et dans l’air les parfums de l’été. On en a les cœurs nets. Et les corps enlacés sous l’eau se reconnaissent. Nos têtes immergées, nettoyées. Je t’aime et je t’ai jetée à la mer.

6  sous le pont de la cité        On ira regarder le soir s’allumer les lampes des boulevards. Je t’écouterai me raconter ta vie dans les bars jusqu’au bout de la nuit. On pourra regarder le ciel. Nos têtes en l’air, penser qu’on n’est pas pareil. Je veux t’entendre dire que tu renonceras pas. Nous on revient de loin, je compte sur toi. On ira encore ensemble voir la pluie tomber sur les landes. Quand plus personne ne voudra de nous. Quand les autres ne tiennent plus debout. Nous, nos têtes en arrière, le regard farouche et fier, on ira respirer le grand air. Ne bouge pas, reste encore comme ça. À l’air libre tout près de moi. Tu sens pas ta peau qui colle à la mienne ? Et ma peau tu sais, c’est tout ce que j’ai. Garde encore un peu dans le cœur le même air que t’avais tout à l’heure. Quand tu m’as dit : « je ne renoncerai pas. Nous on revient de loin, tu peux compter sur moi. » Même si ça fait un mal de chien, si d’autres encore nous briseront les reins. Quand nos vies seront sans dessus, dessous. Quand tout en nous sera à bout. Si on tient plus la distance, si en nous tout tremble et flanche, on ira prendre notre revanche.

7  je n’ai pas tué mon père (il s’est débrouillé tout seul)       Il y avait ce qui nous opposait, ce qui entre nous se malmenait, se cognait et n’allait pas du tout. Nos vies qui s’éparpillaient aux quatre vents. Mais dans le fond peu nous importait car en fin de compte le monde allait toujours tourner indéfiniment. Quand soudain t’es parti et j’avais rien regardé. T’avais les yeux qui brillent et un point de côté on pouvait penser encore ensemble que rien n’allait nous réduire en cendres. Mais tu vois comme tes mains tremblent et comme tout ça n’a plus d’importance. Tandis que je buvais du ciel, tu faisais tes adieux. T’avais du plomb dans les ailes, moi l’or dans les yeux. Et tandis que tu tirais ta révérence, je m’avançais sur scène sans méfiance avec négligence. Puis sont venues les heures lourdes comme de bien entendu. Pleines de remords, de regrets de tout ce qu’on avait perdu. A croire qu’on s’était menti éperdument. Et que tout ça n’avait duré rien qu’un instant. Faut croire que le monde s’est arrêté finalement. Ne me dis pas qu’il n’y a pas au moins un banc où on pourrait aller s’asseoir, discuter un moment. Un chemin de forêt. Une rivière sans tous ces gens. On serait bien. Ca te plairait. Ah si seulement. Mais il faut croire que tout ça c’est fini et que c’est loin maintenant. Quand soudain t’es parti et j’avais rien regardé. T’avais les yeux qui brillent et un point de côté. On pouvait prendre le temps. Mais tu vois comme tes mains tremblent et comme tout ça n’a plus d’importance.

8  tout à regretter      Regarde-toi. Qu’est-ce qu’on fera nous deux si un jour on n’en peut plus. Si tout s’en va. Tout ce qu’on a dans les yeux. Si plus rien ne brûle. Alors ajoute une petite bûche. Et regarde-toi. Qu’est-ce qu’on fera nous deux. Qu’est-ce qu’on fera, dis, si rien ne vient pour nourrir un peu nos joies, nos envies. Comme un feu qui s’éteint. Comme un feu qu’on oublie. J’ai rien regardé. J’ai tout à regretter du temps passé en ta présence. Et bientôt ton absence me brûlera comme un mort sur la conscience. Regarde-moi. Toujours le même combat : briller encore un peu. Mais que vienne l’orage et que viennent les éclairs. Qu’ils nous regardent de travers dans leurs grands feux de joie. Et éclaire-moi. Qu’est-ce qu’on fera nous deux de nos jours de nos nuits. Et peut-être qu’un soir, l’amour qu’on a dans les yeux s’en ira comme un feu qui s’éteint sous la pluie. Mais maintiens-le encore un peu. Parce que j’ai rien regardé. J’ai tout à regretter du temps passé en ta présence. Et bientôt ton absence me brûlera comme un mort sur la conscience. Nous on ira ronger la terre jusqu’à l’os. Et la bouffer toute crue j’ai faim. Et quand on aura fait ça, alors on pourra mourir comme un feu qui s’éteint laissé sous la pluie. Comme un feu qu’on oublie.

9 réservoir        Et j’ai passé ici la journée dans l’épaisse poussière des rues. Le soleil a essayé de les brûler mais les cicatrices n’ont pas disparu. Les pensées me rongent. Taches et noires ombres qui dansent à tue-tête complètement ivres. Il ne fait pas encore sombre mais on y arrive. J’ai passé mon temps à faire comme je peux pour ne pas penser à elle. Mais ça me ronge comme un feu dont les flammes sont si cruelles et semblent bien être immortelles. Cette femme était si malsaine et folle que je n’en toucherai pas d’autres avant des années. Je ne suis plus à la recherche de rien dans les yeux de personne. Je me sens l’âme en lambeaux et le cœur scotché. Mais même le scotch a été trop usé. Et j’ai pleuré amer à même le sol, pensant : « je prends n’importe quoi pour tuer mes pensées. » Alors j’ai ouvert le livre blanc de mes mains molles et j’ai bouffé les mots les yeux bouffis et mal – les yeux bouffis et malmenés. J’ai lu là des heures durant. A m’en crever le cœur et le ventre. Mais tu vois quand un passant m’a jeté une pièce j’ai su qu’il était temps de s’en aller. J’ai l’air d’une bande d’ivrognes chancelants. Qui se querellent avec eux-mêmes. Une sorte de mendiant. Une bonne leçon pour avoir dit je t’aime. Mais je ne vais pas en rester là. Il reste de la route à faire. Je vais entrer dans un bar pour oublier les bonnes manières. Dans mes doigts brûle un cigare. Il règne ici une drôle d’atmosphère. Je regarde tous ces gars. Épaves humaines et traine-misères. Je m’approche du comptoir. La fille me dit qu’est-ce que je te sers. T’es pas du coin, toi. Pourquoi t’es là ce soir. J’lui dis j’avais vu de la lumière. Dans l’épaisseur de l’alcool il y a son parfum. Oh un air doux de presque rien. Son sourire ses yeux ses seins ses cuisses ses reins. De quoi vendre son âme au diable. Tout un festin. Mais après avec le diable tu lui appartiens. Et moi mon âme s’appelle reviens. Alors je lui lève mon verre. Je bois à elle et lui dit bonsoir. Et j’vais m’asseoir à l’autre bout de la terre. Bien, bien loin de son comptoir. Là un homme se dresse de tout son long. Les yeux pointus comme des clous. Défait son froc et pisse tout de bon. Les yeux mouillés la gorge en chant et le feu aux joues. Il a les dents comme cent chevaux dont on ne verrait plus que les os. Les ongles longs comme des vallons où poussent les sales feuillages et les ronces. Les mauvaises engeances et les vagabonds. Ses cheveux hirsutes sont peignés de vent. Dans chaque main un verre de bourbon. Il chante et met dans son chant ses heures de gloire bues par ses démons. Puis ce n’est plus qu’un cri. Un cri d’épées qui croisent le fer. A rebondir à fendre la nuit en un rire de métal. « Mon âme vit sa saison en enfer ! Tandis que mon cœur cueille les fleurs du mal ! Non ! Mon cœur sont les fleurs du mal ! » La fille qui est venue me resservir me dit, on sait pas trop si c’est un vampire ou un ange qui a échoué ici. J’lui dis c’est peut-être juste un homme. Pas mieux, pas pire. Je rejette un œil à l’assemblée. Tous puent, toussent, crachent et puent de plus belle. Suent l’alcool ingurgité. Allez, sus aux gorges brûlées des infidèles. Mais dans le coin là-bas il y a un autre qui ressemble à un soleil sans lumière. Une sorte d’astronaute qui fait son retour sur terre. Il a les épaules si épaisses qu’elles semblent se prolonger par temps de vent. La peau qui rouille car même l’air le blesse. Les yeux lunaires comme deux cratères blancs. Il baragouine dans sa barbe quelques sentences en prophète. Ses murmures me parviennent par bribes. Et viennent faire chanceler ce qui me restait de tête qui chavire et verse dans la tempête. Puis il me fixe de ses yeux de rien et dit : « Il n’y pas d’âme. Personne ne t’a détruit le cœur. Tu t’es débrouillé seul à le saccager comme un jardin où ne pousseront plus de fleurs.» Je ne sais pas trop ce qui m’a pris mais je suis resté encore longtemps parmi tous les maudits. De voir les autres qui ont mal tu sais c’est rassurant. Et puis à voir les morts on s’en sent vivant. Et ainsi j’ai passé ici la nuit dans l’épaisse chaleur de la fumée. L’alcool a essayé de les faire fuir mais les cicatrices se sont pas refermées. Les pensées me sont devenues de noirs frères qui dansent toujours. Toujours plus ivres. Il ne fait pas encore clair mais on y arrive.